58. Musée régional de la poterie à Ger. Chanson de Joseph Mague. Photos

6 – Les Potyis carte postale n° 11

Joseph Mague

Graphie de l’auteur, puis en fin de billet le même texte en orthographe unifiée…

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Richards qui passez en auto,
Ou bonn’ gens que l’ tramway charrie,
V’là L’ Tronquay, Noron-la-Pot’rie !
Descendez tous pour vai les pots.
Entrez, Messieurs, dames et d’mouéselles,
Si sont tous barbouillis d’ lâqu’ron
Les potyis sont bons compagnons,
Teurjoux galants d’aveuc les belles.

 

Gens riches qui passez en auto
Ou bonnes gens que le tramway transporte, (ou amène)
Voilà Le Tronquay, Noron-la-Poterie !
Descendez tous pour voir les pots.
Entrez messieurs, mesdames et mesdemoiselles,
S’il sont tous barbouillés de barbotine (argile fine et fluide)
Les potiers sont de bons compagnons,
Toujours galants avec les belles.

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Photos prises à Ger, Musée régional de la poterie visité le lundi 7 avril. Merci au guide Gildas Le Guen et au potier qui tourne les pots devant le public…

DSC00499 pots à Ger couleurs pastel

N’en v’là-t-y des pots dans la coûe,
Des mahons, des bouett’, des terreines.
Des bobins, des gatt’ et des teines
No vient d’ tirer tout cha du foûo.
Guettez par chin, ch’est la séqu’rie,
La loge du foûo, l’atelier,
Eiou qu’nos pil’ preus du terrier
La terre avant d’ fair’ la pot’rie.

 

Comme il y en a des pots dans la cour,
Des pots de grès, des boîtes à sel, des terrines ????
Des grosses cruches, des jattes, des tènes
On vient de les sortir du four.

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Regardez par ici, c’est le séchoir,
Le four, l’atelier,
Où l’on foule près du trou
La terre avant de faire la poterie.

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Y a-t-y des patiax sus l’ tabier ?
No va, d’vant vous, fair’ eun’ boutelle,
Nos daigts, not’ reue et nos âttelles,
Ch’est tout c’qui faut pour travailler
Allez tournez ! Not’ bell’ terr’ breune
Dans nos mains monte et s’élargit,
Pour el’ goulot cha s’rétréchit,
Un coup d’laton : n’en v’là co yeune !

 

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Y a-t-il des pâtons sur la planche?
On va, devant vous, fabriquer une bouteille,
Nos doigts, notre tour et nos attelles
Cela nous suffit pour travailler
Allez tournez ! Notre belle terre brune
Dans nos mains monte et s’élargit,
Pour le goulot, ça se rétrécit,
Un coup de fil de cuivre : en voilà une de plus !

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Maint’nant faut pas parti comm’ cha
Sans vai la pot’rie artistique,
J’avons là des pots magnifiques
Pieins d’fieurs, de fruits, de p’tits ouésiax.
A vot’ bourgeouaise, à vot’ bell’mère
Rapportez donc un p’tit souv’ni,
Un vase à fieurs, eun’ tabatière
Eun’ cann’ normande entourée d’ gui.

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Maintenant, il ne faut pas partir ainsi
Sans voir la poterie artistique.
Nous avons là des pots magnifiques
Couverts de fleurs, de fruits et de petits oiseaux.
A votre femme, à votre belle-mère
Rapportez donc un petit souvenir,
Un vase à fleurs, une tabatière
Une canne normande ornée de gui.

(le mot normand est vi pour gui, mots issus du latin viscum qui signifie gui et glu. Le dérivé viscosum a donné visqueux).

DSC00372DSC00394 marguerites au coeur quadrillé

 

 

6 – Les potiers (traduction en français proposée par Maurice Fichet) :

Terrène : Récipient dans lequel on mettait le lait pour que la crème monte. Pas d’équivalent en français à ma connaissance.
Les bouètes : boîtes à sel ?
Les tènes : mesure de 50 litres… ?
Mahoun : énorme pot en grès vertical où l’on met le beurre salé destiné à l’exportation (sinot ventru en Cotentin).
Latoun : fil de cuivre, le fer rouillerait.
Dans les poteries il y avait un trou où l’on stockait l’agile et on la travaillait, le terrier, on la foulait avec les pieds.
tabllet : tablier sur lequel sont posées les ruches ou plate-forme de la batteuse sur laquelle on délie les gerbes. Les potiers avaient à côté d’eux une sorte de planche sur laquelle ils posaient leur pâtons d’argile recouverts d’un chiffon humide, c’est peut-être de cette sorte de planche dont il s’agit, tablette.

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Voici ce que cela donne en rafraîchissant la graphie de Joseph Mague sans changer ses particularités, mais avec un a aux verbes du premier groupe -aer, dont la prononciation peut être a ou bien er.

LES POTYIS de Joseph Mague (Bessin vers 1910)
Richards qui passaez en auto,
Ou bouones gens qué le tramway charrie,
V’là le Tronquay, Noron la Poterie !
Descendaez tous pouor veî les pots.
Entraez, Messieus, Dames et D’mouéselles,
S’i sount touos barbouillis de lâqueron
Les potyis sount bouons coumpagnons,
Terjous galaunts d’aveuc les belles.
N’en v’là-t-i des pots dans la coue,
Des mahons, des bouettes, des terrènes,
Des bobins, des gattes et des tènes :
No vyint d’ tirer touot cha du fouo !
Guettaez par chin, ch’est la séquerie,
La loge du fouo, l’atelier,
Eiou que no pile preus du terrier
La terre avant d’ faire la poterie.

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Y-a-t-ides patiâs sus l’tabllyi ?
No va d’vaunt vous faire eune boutèle.
Nos deigts, note reue et nos âttèles,
Ch’est tout ce qui fâot pour travailli
Allaez tournaez ! Note belle terre breune
Dauns nos mans mounte et s’élargit,
Pour el goulot cha s’ rétréchit,
Un coup d’laton : n’en v’là co yeune !

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Maintenaunt fâot pas parti coume cha
Sauns veî la poterie artistique,
J’avouns là des pots magnifiques
Pllens d’ flleurs, de fruits, de p’tits ouésias.
A vot’ bourgeouèse, à vote belle mère
Rapportaez doun eun p’tit souveni,
Eun vase à flleurs, eune tabatière
Eune canne normaunde entouraée d’ gui.

Garder la graphie de Mague sans y toucher est une solution paresseuse qui évacue la difficulté de l’adaptation du texte à une graphie adaptable à toute la Normandie…
Le premier problème est celui des apostrophes remplacées par des e muets, que j’ai laissées dans un premier temps (pour respecter le nombre de pieds) puis souvent supprimées, tout en en mettant un accent sur certains e mis par Mague quand ils se prononcent é.

Jje crois qu’enlever les apostrophes et mettre un e muet comme en français cela passe bien, c’est une question d’habitude… On n’écrit pas : une cass’rol’.

C’est quand même mieux de moderniser, plutôt que de garder une graphie anarchique préexistante aux propositions de F. Lechanteur (voir tous ses arguments donnés vers 1950, il y a plus de 60 ans !).
A mon avis, il faut conserver des particularités de prononciation locale bien sûr. Mais rien ne s’oppose au fait d’écrire ei au lieu de ai, âo au lieu de aô, ène pour les ines en fr (épène, épine), aun qui est prononcé autrement que an dans tout le Cotentin au moins. Aun peut aussi être lu an… Conservons aussi oun qui marque un allongement du on (j’avouns) [c’est discutable en fin de mot, comme quéton, car la tendance à dire oune par les lecteurs débutants est très forte]. Mague écrit aussi bien parfois bon que bouon donc je mets tout en bouon.

Alors écrivons dans la graphie d’aujourd’hui ! Même si elle ne résout pas tout, loin de là, elle offre une cohérence : qu’en serait-il si le français n’avait pas eu d’orthographe au 17è s. ? (elle n’a pas bougé depuis, ce qui est absurde car la prononciation du français a beaucoup changé (ex : flamme se prononce flame, au 17è s. c’était nasalisé : on disait flan-me : il y a eu ouverture des nasales au 17è s. et disparition de diphtongues (conservées inutilement dans la graphie du français, fossilisée contrairement à celle de l’espagnol…). Les Normands ont conservé les diphtongues, donc il est logique de les écrire !

Rémin

11 les potyis rev 30

Joseph Mague (1875-1940) a écrit des poèmes de qualité en français et en normand. En particulier, ses vingt-quatre « Canchons du Bessin » sont recherchées par les collectionneurs de cartes postales, mais les mélodies en sont ignorées ou perdues. Ces poèmes font revivre les Normands des années 1900-1914. Humour et nostalgie ajoutent un intérêt aux descriptions ethnographiques.

Daniel Bourdelès est tombé sous le charme de La Feire ès Ougnons, la Partie d’ Mé, Les trachous d’ bouais, La grousse Angelina, La p’tite servante, La Dentelière… et des Potyis ! Il a composé des mélodies qu’il chante sur un nouveau CD titré « Angelina »…

Livret CD Mague p 16 001DSC07236

DSC00424 « Au Goubelin malin », Lionel Jean, céramiste, 28 Chemin de la Raterie 50260 SOTTEVAST, téléphone : 02.33.41.97.29 lioneljean.50@orange.fr ; http://www.augoubelinmalin.wifeo.com

 

1 commentaire

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Une réponse à “58. Musée régional de la poterie à Ger. Chanson de Joseph Mague. Photos

  1. Byi d’ako do vos !

    Une graphie doit évoluer ainsi qu’un langue sinon elle devient une langue morte ! Aussi la graphie standardisé actuelle pose de nombreux problèmes et est relativement peu populaire ! C’est pour cela qu’avec quelques jeunes de Bayeux Rouen et Paris nous nous penchons sur une graphie qui serait plus lisible et qui aurait le désir de porter le normand dans l’avenir !

    Voilà quelques exemples ( nous n’en sommes qu’au début, le reste du travail viendra après )

    -aun ( qui se dit an ou ain ) : àn ( bastaunt:bastànt; normaund:nourmàn; jaunvyi:jànvyi )
    -aé,aée,aer ( qui se dit a eu é è o ) pose un vrai problème , nous avons pensez a -æ ( pâosaer : pâosæ ) a -ae ( pâosaer : pâosae) ou a -a ( pâosaer : pâosa, qui se dirais pâosa, pâoseu, pâoso, pâosé, pâosè )
    Les -h qui ne se prononcent pas nous les retirons ( eun houme : eun oume , eune histouère: eune istouère, hissaer la veile: issa la veile )
    -gu ( qui se prononce dj) devient tout simplement -dj ( guetti:djetti )
    -qu ( qui se prononce desfois k mais le plus souvent tch ) la aussi problème, nous avons pensez le mette -tch ( quœu:tchœu ; qui:tchi ; roqui:rotchi ) ou -qù (qùœu ; qùi ; roqùi )
    -yin ( qu’on dit le plus souvent i ) nous devient yi ( byin:byi ; Quyin:tchyi ) et yi’n devant une voyelle (byi’n avei )

    La graphie d’aujourd’hui n’est absolument pas adapté a la langue parlée, ahoqui ce dit arotchi , quyin ce dit tchi, halaer ce dit rala ou raleu ( le plus souvent ) ect… Il est trop difficile d’entrer dans cette langue par cette graphie

    Nous essayons donc de développer une graphie ( qui ne serait pas farfelue mais qui s’appuyait sur le travail des graphies précédentes dont celle de Gires-Ganne ) qui correspondrait plus a la langue qu’on entend communément

    Nous pensons aussi a développer quelque chose qui permettrai de « sauver » le h guttural , si on ne le voit pas dans la graphie il est quasi sur de disparaître.
    Idem pour trouver une alternatives aux innombrables apostrophes ( d’la , de l’ , pouo l’ , sus l’) le -le normand pose un problème ( entre -eul, lé, l’)
    Nous cherchons aussi une alternative au -in au masculin qui devient -ène au féminin ( Coutentin, Coutentène… )

    Comme je l’ai dit précédemment, nous n’en sommes qu’au tout début !

    Je précise que cette graphie n’a pas pour but de « détruire » la graphie Lechanteur, ou le normand actuel, nous proposons juste une autre graphie qui selon nous serait plus adaptée au normand d’annyi !

    Meurchi byi pouo l’attentioun pis a byitôt dé vos luure !

    A s’vei et boujou tcheu vos !

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